CLEMENTINE GIRY

Notaire salariée

Réforme de l’adoption

Actualités

Réforme de l’adoption, établissement du lien de filiation des enfants nés d’un couple de femmes mais également simplification de la procédure de changement de nom de famille et désignation de l’enfant né sans vie sont autant de thèmes majeurs du droit de la famille ayant subi des modifications substantielles depuis moins d’un an.

Nous les abordons succinctement ci-après.

Réforme de l’adoption

La loi du 21 février 2022 a, certes, marqué les esprits par l’ouverture de l’adoption à toutes les formes de couples, il n’en demeure pas moins qu’elle a procédé à des clarifications mais également à d’importantes modifications : assouplissement des conditions, encadrement de la procédure d’adoption, et modernisation des effets de l’adoption.

1) Conditions de l’adoption

Désormais ouverte aux conjoints, mariés, partenaires pacsés ou concubins, l’adoption requiert seulement une année de vie commune, contre deux auparavant.
Les membres du couple ou l’adoptant seul sont âgés de plus de 26 ans (28 ans avant).

 

Il est également à noter que, par dérogation, et pour une durée limitée à trois ans à compter du 22 février 2022, la mère de l’enfant né d’une assistance médicale à la procréation (AMP) réalisée à l’étranger avant la loi du 3 août 2021, qui refuse la reconnaissante conjointe à la femme qui n’a pas accouché, pourra se voir imposer, par décision judiciaire spécialement motivée l’adoption de son enfant au profit de la femme évincée.

Cette dernière peut demander à adopter l’enfant sous certaines conditions (rapporter la preuve du projet parental commun, de la réalisation de l’AMP à l’étranger avant la loi bioéthique).

 

Quant aux conditions requises pour l’adopté, l’article 345 du Code Civil modifié ouvre l’adoption plénière à d’avantage d’enfants âgés de plus de quinze ans jusqu’à leurs 21 ans (20 ans jusqu’à présent).

 

Le nouvel article 343-3 du Code Civil dresse un nouvel empêchement à l’adoption entre ascendants et descendants en ligne directe et entre frères et soeurs (règle pouvant toutefois être écartée par le tribunal, lequel pourra « prononcer l’adoption s’il existe des motifs graves que l’intérêt de l’adopté commande de prendre en considération ».)

 

Enfin, est désormais ouverte la possibilité d’adopter le mineur de treize ans et le majeur protégé hors d’état d’y consentir personnellement.

2) Encadrement de la procédure d’adoption

Sur l’adoption internationale, la loi la définit à l’article 370-2-1 du Code Civil, conformément aux dispositions avec la convention de La Haye.

 

Concernant l’adoption interne, les organismes autorisés et habilités pour l’adoption (OAA) ne peuvent désormais agir que dans le cadre de l’adoption internationale.
Seule l’ASE (le service d’Aide Sociale à l’Enfance) pourra recueillir les enfants donnés à l’adoption sur le territoire français.

 

Un bilan d’adaptabilité de l’enfant, dès son admission à la qualité de pupille de l’Etat, est également prévu pour favoriser la réussite de l’adoption.

 

Inscrite dans la loi, l’agrément des candidats à l’adoption est réformé : il est délivré lorsque la personne candidate à l’adoption est en capacité de répondre « à leurs besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs ».

3) Modernisation des effets de l’adoption

La loi a mis en valeur l’adoption simple par une définition positive à l’article 364 alinéa 1er du Code Civil « L’adoption simple confère à l’adopté une filiation qui s’ajoute à sa filiation d’origine. L’adopté conserve ses droits dans sa famille d’origine. »

 

Désormais, l’adjonction du nom de l’adoptant à l’adopté simple de plus de treize ans devra obligatoirement requérir son consentement.
Le changement de prénom de l’enfant adopté de manière plénière nécessitera également le consentement de l’adopté.

 

La loi tient ainsi compte de l’avis du mineur dans les effets de la filiation nouvellement établie.

 

-> Réforme de l’adoption (LOI n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l’adoption https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045197698/ )

Procédure simplifiée dans le choix du nom de famille

Partant du constat que 85% des enfants reçoivent le nom de leur père à la naissance, et que des difficultés apparaissent quasi systématiquement pour la mère, alors séparée du père de l’enfant, pour apporter la preuve de sa parentalité, la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 tend à faciliter les démarches de ceux qui souhaitent porter le nom du parent qui ne leur a pas été transmis à la naissance (nom d’usage ou nom de famille).

 

Ainsi, à compter du 1er juillet 2022, une procédure simplifiée de changement du nom de famille à la majorité entrera en vigueur : toute personne, pourra, une fois dans sa vie, à ses 18 ans, substituer le nom de famille du parent qui ne lui aura pas été transmis.
Il sera ainsi possible de choisir son nom de famille, en retenant celui de sa mère, de son père, ou les deux, dans l’ordre qu’il souhaite.
L’inversion des noms telle que décidée par les parents à la naissance de l’enfant pourra également être demandée.

 

Contrairement à la procédure longue et complexe actuellement existante (démarche auprès du Ministère de la Justice), une simple déclaration à l’officier d’état-civil de la commune du lieu de naissance ou du domicile sera nécessaire.

 

Afin de s’assurer de la démarche déterminée et constante de l’intéressé, un délai de réflexion lui sera imposé : au terme d’un délai d’un mois, il lui sera demandé de se présenter à nouveau devant l’officier d’état-civil pour confirmer sa demande.

Ce changement de nom produira ses effets à l’égard de la personne ayant sollicité la modification mais également aux enfants du demandeur : de manière automatique pour ceux de moins de 13 ans, et avec leur consentement au-delà de cet âge.

 

-> Nouvelle disposition dans le choix du nom de famille (LOI n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045287682/ )

Dispositions de la Procréation Médicalement Assistée ouverte aux couples de femmes

Avec la loi bioéthique du 2 août 2021, un nouveau mode d’établissement de la double filiation aux couples de femmes mariées ou non a été consacré : la reconnaissance conjointe anticipée.
Une circulaire du 21 septembre dernier puis le décret du 1er mars 2022 sont venus préciser les formalités et les obligations pesant sur le notaire.

 

En charge de recueillir le consentement préalable des candidates à l’AMP (Assistance Médicale à la Procréation), l’officier ministériel doit informer le couple des conséquences de leur acte sur la filiation et des conditions dans lesquelles l’enfant, une fois devenu majeur, pourra, s’il le souhaite, accéder aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur.

 

Quant à l’établissement de la double filiation maternelle, le notaire devra, concomitamment à l’acte de consentement préalable à AMP, dresser l’acte de reconnaissance conjointe.

 

A la naissance de l’enfant, cet acte est remis à l’officier d’état civil pour y faire mention dans l’acte de naissance.

 

Ainsi, la filiation sera immédiate et conforme au droit commun pour la femme ayant accouché de l’enfant ; pour l’autre femme, sa filiation avec l’enfant sera établie au moyen de l’acte de reconnaissance conjointe.

 

Les deux femmes choisissent alors le nom donné à l’enfant : soit le nom de l’une d’elles, soit les deux nom accolés dans l’ordre choisi par elles (à défaut de choix, l’enfant prendra les deux noms dans la limite du premier nom de famille de chacune des mères, accolés dans l’ordre alphabétique).

 

Enfin, et pour le cas de la réalisation d’une AMP à l’étranger avant, il a été prévu, pour une période transitoire de trois années à compter de la publication de la loi bioéthique (soit jusqu’au 3 août 2024), pour le couple de femmes y ayant eu recours, à la reconnaissance conjointe.

 

Cette possibilité est offerte sous réserve que la filiation de l’enfant né de cette AMP ne soit établie qu’à l’égard de celle qui a accouché et que le projet parental ait été porté par le couple de femmes.
Ces conditions faisant l’objet d’une vérification par le Procureur de la République avant la demande d’inscription de la reconnaissance conjointe en marge de l’acte de naissance de l’enfant.

 

-> dispositions en matière d’assistance médicale à la procréation (LOI n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGISCTA000043886042/ )

Identité des enfants nés sans vie

Mesure avant tout symbolique dans l’accompagnement de leur deuil, la loi accorde ainsi désormais aux parents la possibilité d’inscrire dans l’acte d’enfant sans vie, le nom paternel, maternel, ou encore les deux noms accolés dans l’ordre choisi par les parents (dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux).

 

La mention du ou des prénoms de l’enfant étant déjà consacrée par la pratique.

 

-> Identité des enfants nés sans vie (LOI n°2021-1576 du 6 décembre 2021 visant à nommer les enfants nés sans vie https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044441223/ )

Tenant compte des évolutions précitées, l’arrêté du 3 mai 2022 modifie l’arrêté du 1er juin 2006 fixant le modèle de livret de famille (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045753065/ ) en le mettant à jour.

 

Ainsi, s’agissant de l’acte de naissance de l’enfant, né d’un couple de femmes ayant eu recours à l’AMP (Assistance Médicale à la Procréation) avec tiers donneur et ayant établi une reconnaissance conjointe anticipée, le texte règlementaire prévoit que la femme qui a accouché est inscrite en premier sur le livret de famille, et l’autre femme, en second.
La mention de la reconnaissance conjointe anticipée est également portée sur l’extrait d’acte de naissance de l’enfant (date de la reconnaissance, identité et lieu de l’office du notaire).

 

Concernant l’inscription du nom de l’enfant sans vie (et de son ou ses prénoms), cette apposition n’emporte aucun effet juridique, comme le précise la partie informative du nouveau modèle de livret de famille (« (…) aucune incidence en matière de dévolution du nom pour les enfants suivants. »)

 

En matière d’adoption, le nouveau livret de famille informe désormais de la possibilité d’adopter l’enfant du conjoint, du partenaire ou du concubin selon les nouvelles dispositions issues de la loi du 21 février 2022.
La partie informative précise également que l’adoption peut être demandée « (…) lorsque la communauté de vie dure depuis plus d’un an ou lorsque les deux membres du coupe ont plus de 26 ans. »

 

Enfin, la liberté en matière d’état-civil est consacrée par un assouplissement et une simplification de la procédure de changement du nom de famille.
Entrée en vigueur prévue au 1er juillet 2022, la partie informative du nouveau livret de famille introduit une brève description des règles concernant le nom d’usage du mineur et prévoit l’insertion de la mention du changement de nom de famille.

Le droit suivant l’évolution de la société, les changements s’y référant ne sont pas toujours aisés à comprendre pour un public non avisé. 


Aussi, être conseillé par un spécialiste du droit de la famille est toujours précieux.

 

Le Pôle Patrimonial de la Famille du Groupe ETUDES MOREAU NOTAIRES demeure à votre écoute sur tous ces sujets ainsi que sur les questions plus conventionnelles de la transmission, du règlement d’une succession ou de la mise en place de conventions matrimoniales (contrat de mariage) ou patrimoniales (PACS).